La Pologne a bénéficié de fonds importants de l’UE pour financer ses grands projets. Elle engrange surtout les bénéfices d’une décennie de réformes, d’un système bancaire sain et d’une politique d’endettement stricte. Cette série est publiée sur notre site avec l’aimable autorisation du journaliste Stéphane Laugée que nous remercions très chaleureusement.

Energie – le défi des 20 prochaines années

« En termes d’énergie, nous avons trois priorités d’investissement : le terminal à gaz GNL, l’exploration du gaz de schiste et l’énergie nucléaire », expose le ministre du budget, Mikolaj Budzianowski. Pour le gaz de schiste, l’exploration n’en est encore qu’au stade des forages sismiques. Selon une étude établie par l’Institut national de géologie, les réserves seraient de 2000 milliards de mètres cubes, là où l’agence américaine EIA avait d’abord parlé de 5300 milliards [source : www.lefigaro.fr, publié le 26/03/2012, « La Pologne déchante sur ses réserves en gaz de schiste »]. Le gouvernement de Donald Tusk a confirmé ses intentions d’exploitation pour 2014. Le projet du nucléaire polonais devrait, lui, se dessiner d’ici 2020- 2022. Le gouvernement prévoit de créer 15-16% de la production d’énergie à l’horizon 2030 avec l’atome. « PGE, le Groupe énergétique polonais, est l’investisseur principal dans ce projet mais ce n’est pas le seul. Nous pourrions commencer à chercher d’autres associés dans ce secteur pour nous engager dans un consortium. Peut-être que des sociétés internationales pourraient être intéressées par ce processus », précise Mikolaj Budzianowski. Des investisseurs étrangers comme EDF par exemple, qui renforcent leur implantation dans ce secteur largement couvert par des géants de l’énergie polonaise : PGE et PKN Orlen. « Notre vision est de devenir l’opérateur de référence, pas le plus gros puisque PGE réalise 40% de la production nationale, et nous 10 », avoue Philippe Castanet, président d’EDF Polska. « Nous sommes prêts à réaliser de nouveaux investissements, ce que nous allons faire avec la construction d’une centrale de 900 MW à Rybnik pour 1,8 Mld d’euros. La Pologne est la 6e économie en Europe avec de très grands besoins dans le domaine de l’énergie. Nous prévoyons une croissance de la consommation de 50 à 70% d’ici 20 ans car le niveau actuel est assez bas. Nous avons pris le pied sur le marché polonais à la faveur des programmes de privatisations. » Sur le dossier du nucléaire, EDF Polska se félicite d’avoir été le premier investisseur issu d’une filiale étrangère à signer un accord avec PGE, l’opérateur exécutif.

Renouvelables

Dépendante encore à plus de 90 % du charbon pour son énergie, la Pologne aimerait changer son image de mauvaise élève de l’écologie auprès de l’Union Européenne d’ici à 2020, date ultimatum fixée aux Etats membres par Bruxelles pour la réduction des quotas d’émissions de CO2, dans le cadre du paquet « énergie-climat ». Un enjeu immense pour la Pologne qui part de loin. «Nous devons respecter certaines obligations de l’Union Européenne en termes d’émissions et nous avons des projets verts comme des parcs éoliens que nous construirons sur la côte Nord, près de la mer Baltique. Trois offshores sont planifiés, l’un sera porté par un privé, les deux autres seront ouverts par PGE», conclut le ministre du budget, un ancien du ministère de l’environnement très impliqué dans les projets liés à l’énergie et notamment aux énergies renouvelables. Dans le domaine des renouvelables, EDF Polska a aussi son mot à dire : « Nous sommes les premiers producteurs d’énergie à partir de la biomasse, qui est la première énergie renouvelable de la Pologne. C’est la « success story » de la Pologne en matière d’énergie renouvelable. Nous représentons 24% du marché », se réjouit Philippe Castanet.

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Focus – Kulczyk Investments: une « success story » à la polonaise

Kulczyk Holdings est le seul groupe polonais d’envergure internationale qui opère dans le secteur du pétrole, du gaz et des mines.

L’histoire de Jan Kulczyk n’est pas banale. Qualifié de « milliardaire tout-terrain », l’homme le plus riche de Pologne a créé un empire actif dans de nombreux domaines. Kulczyk Investments marque aujourd’hui de son nom le monde de l’énergie et des infrastructures. Mais avant cela, on associait plus volontiers le nom du milliardaire polonais de l’après-communisme à l’automobile et aux produits de consommation. Un virage à 180°C et une vraie réussite : Kulczyk Investments est l’un des premiers groupes privés polonais à investir à l’échelle internationale.

Un modèle de la transformation polonaise. Dariusz Mioduski, PDG de Kulczyk Investments, salue le « nez » de cet homme d’affaires : « Après avoir rejoint l’Union européenne, de nouveaux challenges ont imposé un changement de la stratégie du groupe, et d’un conglomérat d’actifs, sans rapport les uns aux autres compte tenu des conditions opportunistes de leur acquisitions, nous sommes devenus un pôle d’investissements international spécialisé dans les ressources minières, l’énergie et les infrastructures. ». L’organisation de la holding Kulczyk a donc changé, elle a désinvesti de ses participations historiques dans l’industrie et les services et son personnel s’est considérablement réduit pour devenir « une nouvelle équipe de spécialistes en management, finance, restructurations, fusions et acquisitions », ajoute le PDG de la nouvelle structure appelée désormais Kulczyk Investments.

Les ambitions de cette jeune entité répondent aux grands dossiers qui font la Pologne d’aujourd’hui. Les infrastructures d’abord, qui ont profité de l’impulsion de l’agenda Euro 2012 de football, mais aussi l’indépendance énergétique en se tournant vers l’exploitation du gaz de schiste et le pétrole, ou encore la recherche de minéraux et autres matières premières. Kulczyk Investments multiplie les investissements, aussi bien en Pologne qu’à l’étranger, avec une forte attirance pour le continent africain. (cf. ci-dessous)

« Mais notre objectif n’est pas d’être simplement un investisseur financier. Outre notre apport en capital, nous recherchons toujours des projets dans lesquels nous participons également au processus créatif et au développement des entités. C’est notre philosophie d’entreprise, et cela nous apporte plus de crédibilité en tant que partenaire ». Comme l’explique Dariusz Mioduski, l’important est de créer un modèle économique « hybride » entre « investissements financiers et création d’entreprises stratégiques, via des acquisitions ».

Une stratégie qui paye au-delà des frontières polonaises. « La deuxième partie de cette vision consiste à sortir des frontières de la Pologne, d’utiliser nos compétences et notre connaissance des transformations économiques pour les appliquer dans des marchés émergents prometteurs. Nous pensons que forts de notre propre expérience, nous avons le savoir faire nécessaire », ajoute le PDG de Kulczyk Investments. Depuis plus de 4 ans, la compagnie s’étend à l’international et fait valoir son expertise.

Une manière de travailler à la polonaise. « La Pologne est un marché qui a un énorme potentiel de croissance », assure Dariusz Mioduski. Et un peuple prêt à saisir sa chance. « Les pays de la CEE ont cette capacité unique de résoudre les problèmes plutôt que de les repousser et les accumuler. Les Polonais ont appris à vivre dans une crise économique permanente pendant plus de 50 ans et ils savent en tirer parti » comme l’ajoute M. Jaroslaw Sroka, membre du conseil d’administration de Kulczyk Investments, en charge du projet CEED, un jeune think tank initié par M. Kulczyk mettant en avant les réussites des pays d’Europe centrale en les rendant utiles à d’autres économies en cours de transformation. Chez Kulczyk, à l’image du pays tout entier, les ambitions sont clairement affichées par M. Mioduski : « Nous espérons pouvoir développer nos 5 piliers stratégiques en Pologne et à l’international, devenir une compagnie universelle et créer des standards d’excellence ».

 


Questions à Dariusz Mioduski, PDG de Kulczyk Investments

Dariusz Mioduski

Dariusz Mioduski

Kulczyk Investments s’est spécialisée dans l’énergie et les infrastructures, en se fondant sur 5 piliers stratégiques. Lesquels ?

Dariusz Mioduski: Le premier pilier, c’est l’énergie électrique. Kulczyk Investments a fondé le premier groupe énergétique polonais de dimension internationale. Il s’agit d’un groupe de sociétés, Polenergia, actif dans le domaine de la production d’électricité de sources conventionnelles et non conventionnelles, du trading et de la distribution.

Le second pilier concerne les infrastructures. Il y a 15 ans, le groupe a investi dans les autoroutes à péage. Nous avons réalisé une première tranche de 150 km sur l’A2 censée relier Varsovie à l’Europe de l’ouest, mais ce tronçon est longtemps resté isolé sans être connecté à aucune ville. Il y a quatre ans, quand la Pologne a obtenu l’organisation de l’Euro 2012, le gouvernement a fait de ce dossier l’une de ses priorités.

Notre troisième pilier, l’immobilier, est lié au précédent. Nous avons créé une joint-venture avec l’un des plus gros promoteurs immobiliers américains, Silverstein Properties, connu pour sa participation à la reconstruction de Ground Zero à New York. Nous sommes convaincus que la région offre un grand potentiel malgré la crise.

Les deux derniers piliers sont le pétrole et le gaz d’une part, les minéraux et l’exploitation minière de l’autre, qui sont au centre de notre stratégie globale. Nous menons 22 projets dans 50 juridictions sur 4 continents représentant une surface globale de 220,000 km carrés.

Pouvez-vous nous parler de vos projets en Afrique …
D.M. : Une première société, Neconde Energy est concentrée sur le Nigeria, avec laquelle nous avons investi sur d’anciennes concessions de Shell et Total. La seconde, Ophir, cotée à la Bourse de Londres, possède 22 concessions dans 10 pays africains en collaboration avec British Gas ou Petrobras. En ce qui concerne les mines, nous avons investi dans le fer au Congo-Brazzaville, dans le charbon au Mozambique ou dans l’or en Afghanistan. En temps que polonais, nous avons des atouts en Afrique car nous ne sommes pas un ancien pays colonisateur, nous avons connu notre propre transformation, nous comprenons mieux les changements que ces pays ont pu traverser. Cela dit nous investissons aussi ailleurs, notamment dans le gaz en Ukraine avec Kulczyk Oil Ventures, et nous sommes actionnaires de Aurelian Oil and Gas qui explore des sources de gaz et de pétrole non conventionnelles en Europe centrale et de l’est.

 

 

Retrouvez l’intégralité du dossier « La Pologne, bastion anti-crise de l’U.E. ? » en cliquant ici

 

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